Nous connaissons la disposition de David Milliat, à exceller dans son métier de journaliste. Il œuvre toujours de manière aimable, bienveillante, attentionnée et respectueuse envers ses interviewés. Ainsi, nous aimons le retrouver au fil des dimanches sur France 2 dans l’émission Le Jour du Seigneur qu’il anime avec la passion qu’on lui reconnaît. Cette altérité il la partage volontiers avec nous dans son livre La force de croire, recueil de témoignages vivants et forts qu’il envisage comme une « enquête intérieure ».
Il parle et s’appuie sur plusieurs acteurs, juifs, chrétiens, musulmans, bouddhistes, agnostiques ou athées. « Tous agissent, tous ont fait le choix du bien », dit-il, et chacun d’eux fortifie les rencontres avec le « croire ». Treize chapitres au total qui portent son credo que David Milliat nous livre. Et ce n’est pas superficiel. Il fait le lien avec ses propres expériences, qu’il traite avec profondeur et respect, avec beaucoup de pudeur et de délicatesse. C’est le cas lorsqu’il évoque la mort de ses parents.
Croire en l’inconnu, l’étranger, la rencontre, la vulnérabilité
Il ne fait pas que décrire. Il dit ce que son métier l’a amené à vivre, à entendre et à voir. C’est ce qui fait la force de son témoignage. Par exemple, il raconte avec émotion ce qu’il a ressenti à Lampedusa. La colère d’un José, fondateur de l’association Pilotes Volontaires, qui ne croit pas en Dieu, est palpable lorsque ce dernier affirme que des migrants ramenés en Libye seront emprisonnés, torturés, violés ou vendus comme esclaves. Milliat cite alors la parole du pape François qui comprend la difficulté à accueillir des exilés mais invite « à ne pas se replier sur nous-même ». Ou Benoit XVI qui refuse de parler de « nombres » mais « d’hommes et des femmes, des enfants, des jeunes et des personnes âgées, qui cherchent un lieu où vivre en paix ». Ici le témoignage est critique, surtout sur la manière dont les Européens refusent d’y voir une réalité sordide.
Croire en la vie, la parole, la vérité, en l’esprit
Si dans l’ouvrage il y a beaucoup de belles choses, dans l’entourage de l’auteur « les drames agissent ». Chez les autres aussi. C’est pourquoi il prend en exemple une de ses amies qui a « choisi de regarder la lumière ». Un beau témoignage pour nous lecteurs qui nous battons souvent contre la tempête, les incompréhensions, les harcèlements, la maladie ou la mort. En ce sens, le livre nous invite à puiser dans nos propres forces, à croire en la vie. Pour se faire, l’auteur s’appuie sur des références solides en matière de parole et de pensée. « Secoue la poussière, relève-toi ! Car ta lumière est venue » dit le Lekha Dodi (va, mon bien-aimé), cantique de la liturgie juive à l’approche du shabbat. Cela résume l’esprit de ce petit livre qui se dévore et ouvre au questionnement. La lumière est venue. Car tous, sommes vulnérables, fragiles. Une faiblesse, qui dans la foi chrétienne, est perçue comme une force. Et de citer saint Paul « quand je suis faible, c’est alors je suis fort ». Pas toujours facile dans le concret de nos vies souligne avec justesse David Milliat. Il est toujours difficile de subir les aléas de l’existence. Mais, en homme de foi, rappelant le psaume 34 : « l’Éternel est près de ceux qui ont le cœur brisé » il lance cette invitation à être attentif à ce « Dieu, force de vie si proche de nous ».
Croire au silence, en la justice, la résurrection, en nous
Les violences qui touchent notre société, David Milliat ne les met pas sous le boisseau. Bien au contraire, tout au long de l’ouvrage il évoque des situations. Il en parle, avec souffrance et inquiétude. Le mal agit, écrit-il, et il lui semble qu’il est « de plus en plus réel ». Il vise ceux qui « savent où est le bien et qui font le mal ». Il prend, autre exemple, l’Église qui a été touchée par le noir des abus sexuels et cite le rapport de la CIASE. Une des plus graves crises que l’Église a pu connaître. Nous pouvons et devons pleurer sur ce qui souille notre Église et fait trébucher notre foi. Mais, et c’est l’idée centrale du livre, il faut constamment se relever et agir, car au bout c’est la lumière. Ce chemin de la lumière est le fil conducteur de l’ouvrage. Citant le philosophe François Sureau, Milliat reprend à son compte l’idée « d’accueillir cette conscience que le mal est plus visible que le bien mais que le bien est profondément à l’œuvre ».